chrisset Invité
| Sujet: Des matins comme celui-là. Dim 22 Oct - 23:22 | |
| Des matins comme celui-là.
Il est des matins comme celui-là où l'on aimerait crier, mais on ne peut pas la peur s'arrache aux tripes comme un vieux papier froissé une envolée qui irrite sans trajectoire ni but, et on y revient.
Il est des mots comme ceux-là qu'on ne peut taire, on ne sait pourquoi d'ailleurs ils coulent tel un canal le long d'un chemin de halage tel une rivière qui rêverait à des accents de torrent.
Et dans un virage, alors qu'on ne croit en rien soudain, le pavillon s'agite sur le pont l'air est là, émouvant et tacite à nous souffler le pourquoi.
Et on se lance dans une danse étonnante légèreté qui nous cueille les jambes et nous délie les poignets des saccades, on tressaute, on gigote, nouvelle née.
Il est des matins comme celui-là où la poussière des anges laisse un sourire sur le parquet, la nuit enchevêtrée d'or et d'orange met l'étincelle à l'envie de dire loin des franges des souvenirs.
Il est des vers comme ceux-là déguisés en dimanche chaussures laquées et jupette blanche dans l'allée des marronniers. Une bosse par-ci, une bosse par-là le front de la petite on la taquine, on la fait fuir mais elle revient des années plus tard elle suit au pas.
Il est des cris comme ceux-là qui ouvrent le coeur, les barreaux, la cage quand la tristesse fait rage et que le ventre fait mal.
Il est des coups comme ceux-là laissés au marteau, à la guerre quand l'enclume caresse la plume pour la saigner, sans la blesser.
Elle vous répond dans la misère et la lutte contre le non, elle crie le oui elle en est fière de pouvoir crier enfin son nom.
Il est des matins, qu'on se le dise tissés à la lumière des étoiles emmaillottés comme une friandise à attendre qu'on lève le voile.
Il y a une langue qui pourlèche une autre qui pourfend la mienne tantôt revêche, tantôt rebelle allume la mèche et dynamite le temps, belle et brûlante comme un bâtonnet d'encens, abrupte et souveraine comme une falaise près de Fécamp, douce et timide comme une feuille dans le vent.
Il est un matin comme celui-là, où je sais que tu n'es pas loin,
et pourtant.
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