La poussière des blés grillés au vent d’autan
S'élève des moissons qui épuisent les champs
Elle recouvre de brume aux volutes brûlantes
Les êtres qui avancent sur la terre fumante
Les tournesols flétrissent à l'air qui les consume
Se courbant peu à peu dessinant l'amertume
De savoir qu'il n'est plus de raison qu'on les cueille
Quand leurs jaunes corolles à cet instant s'effeuillent
Les cours d’eau asséchés ne sont que marécages
Quand manquent les torrents aux monts et aux alpages
Et il n'est de vision pire que l'eau stagnante
Putréfiant au soleil la vie de quelques plantes
Les arbres encore feuillus aux rares fleurs séchées
Perdent leurs fruits si mûrs qu’ils en viennent à tomber
Et l'on sait impuissantes les saveurs qui s'égarent
Sur l'herbe ou nul poète ne va venir s'asseoir
L'herbage terne et gris de vallons et de plaines
Se lit en noir et blanc telle une image ancienne
Quand un vague brouillard annonce les orages
Et que des vents humides montent du fond des âges
Au couvert des bosquets les bêtes qui soupirent
Se protègent à l'ombre que le soleil déchire
Quand la chaleur blanchit le vert des pâturages
Et qu'il ne reste au ciel que zestes de nuages…
…Les villages s'enchantent à l'heure des labours
Dans l'odeur insistante d'un fumier de cent jours
Les sillons deviendront nos mères nourricières
Quand germera demain ce grain que l'on enterre
Les eaux se renouvellent dans le lit des rivières
Quand les torrents s'abondent à nos montagnes fières
Et les pluies qui ruissellent aux pentes des vallées
Font les fleuves porteurs de mémoires fanées
On devine la sève qui patiente en silence
Timide en de longs mois mais en reconnaissance
De printemps émergents ou d'automnes riantes
Quand fraîcheur et douceur font l’aube vivifiante
Ce n'est que d'alternance que les vivants espèrent
Quand il faut qu’on attende et que passe l’hiver
Toujours seront les fruits d'une saison enfuie
S'il est un renouveau pour lendemains bénis
Nos étés sont en l'âme lourds des gloires passées
D'un trop plein d'émotions aux années entassées
Quand on recueille enfin leurs immenses fortunes
Les forces qui les firent se perdent une à une
Ainsi se font déserts nos pays et terroirs
Pour qu'enfin se dévoilent les cycles d'une histoire
D’où surgiront alors les jachères fécondes
Qui nous sont le dessein de l’harmonie du monde
Au profond d'un abîme de détresse et d'ennui
Plongeons notre regard comme on fait dans un puits
Glissons dans l'inconnu des ans que l'on épure
Pour y trouver parfois, offerts et sans armures
Les cendres d'un phénix, l'idée d'un paradis
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