La décharge
J'étais sur la décharge un matin de printemps
Je savais pourtant bien ce que je venais voir,
Mais je croyais venir “en témoin", pour pouvoir
Constater calmement, en "esprit scientifique"
"objectif, constructeur, lucide et méthodique"..
Et cependant comment aurais-je pu prévoir
Que j'allais tout d' un coup vomir mon désespoir
Devant ce tas de merde, immonde dépotoir ;
Devant l'assassinat lucide, organisé,
De ce simple décor de collines brûlées
Où poussaient au printemps le thym, les orchidées
Qui faisaient le bonheur de qui savait les voir !
Le golfe était gris bleu, un Mistral indocile
Balayait le plateau qui aurait du chanter
La liberté du vent et l'odeur des collines.
Mais l’homme était passé par là, "aménageant"
Ce décor "sans valeur", cet espace "inutile",
Réglé au bulldozer, éventré de ravins
Où des camions douteux, vidangeurs maléfiques,
Versaient leurs cargaisons puantes et toxiques !
Terrasses de gravats sur les bancaous détruits,
Flammes et puanteur sur la garrigue en ruines...
Provence, mon oiseau ! ma fleur ! On t'assassine !.